Fibromyalgie : soulager sa douleur comme on peut

Une étude québécoise montre un écart entre les médicaments recommandés et ceux réellement utilisés pour atténuer la douleur chez les individus atteints de fibromyalgie.

Une équipe québécoise s’est penchée sur les médicaments utilisés pour gérer la douleur chronique chez les personnes souffrant de fibromyalgie, une maladie du système nerveux central qui engendre une douleur considérable dans une ou plusieurs parties du corps.

« Il y a une différence marquée entre les recommandations médicales et ce que les personnes nous ont rapporté prendre comme médicaments », constate Gwenaelle De Clifford-Faugère, chercheuse à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT) et auteure de l’étude publiée dans Canadian Journal of Pain.

Elle ajoute qu’une proportion significative des 63 personnes interrogées – en majorité des femmes – déclarent consommer des opioïdes (33% des répondants), des anti-inflammatoires prescrits ou non tels l’ibuprofène (54%), et du cannabis médical (34,9%). Pourtant, selon la chercheuse de l’UQAT, il n’existe pas suffisamment de données scientifiques sur l’efficacité de ces médicaments à soulager la douleur associée à la fibromyalgie.

En ce qui concerne les médicaments qui sont recommandés pour le traitement de la maladie, les participants et participantes à l’étude mentionnent consommer des antidépresseurs (55,6%), des anticonvulsivants (36,5% du groupe), et du tramadol, un opioïde synthétique (23,5%).

Qu’est-ce qui explique l’écart entre les médicaments recommandés et ceux réellement pris? L’étude révèle que plusieurs personnes se tournent vers des médicaments en vente libre notamment quand les médicaments prescrits ne suffisent pas. « C’est probablement parce qu’ils ne sont pas soulagés. Par exemple, le Tylenol [consommé par 73% des personnes] est facile d’accès et sans prescription. Cependant, cela n’est pas sans danger d’en prendre sur une période prolongée », met en garde Gwenaelle De Clifford-Faugère.

Les personnes incluses dans l’étude souffraient de douleur chronique depuis une période allant de 3 à 64 ans. « La fibromyalgie, c’est avoir mal partout. L’impact de la maladie est énorme. Malheureusement, on ne réussit pas à offrir l’entièreté des services dont ils auraient besoin. On n’est pas capable de les guérir contrairement à d’autres types de douleurs chroniques où là, ça répond bien à la médication », se désole Anaïs Lacasse, professeure titulaire de la Chaire de recherche institutionnelle en épidémiologie de la douleur chronique à l’UQAT, qui a aussi participé à l’étude.

Gwenaelle De Clifford-Faugère indique que la prise de médicaments varie aussi d’une personne à l’autre selon les comorbidités, soulignant du même coup la complexité du traitement de la fibromyalgie. « Certaines personnes avaient à la fois de la fibromyalgie et de l’arthrite. C’est sûr que la médication sera plus complexe », rapporte la chercheuse.

Par ailleurs, la douleur chronique (c’est-à-dire qui persiste plus de trois mois) peut être déclenchée par divers problèmes de santé comme l’arthrose, les maux de dos et la fibromyalgie. La chercheuse Anaïs Lacasse souligne la nécessité d’un bon diagnostic : un médicament recommandé pour la douleur chronique associée à une migraine peut différer de celui recommandé pour la douleur chronique provoquée par l’arthrose, par exemple.

Prise en charge complexe

Les personnes qui souffrent de fibromyalgie se heurtent à plusieurs défis pendant leur parcours médical, du diagnostic au traitement.

« Il n’y a pas de diagnostic précis de la maladie. On doit y aller par exclusion en éliminant des problèmes de santé qui pourraient mimer la fibromyalgie », signale Serge Marchand, professeur associé à la Faculté de médecine et des sciences de la santé à l’Université de Sherbrooke. « Les centaines de patients que j’ai vus et qui souffrent de fibromyalgie me racontent tous la même chose : ils sont obligés de voir 5, 6, 10 médecins avant d’obtenir un diagnostic », confie-t-il.

Serge Marchand a mené plusieurs études selon lesquelles il pourrait exister plus d’un type de fibromyalgie. « À mon avis, il n’y a pas une fibromyalgie, il y a DES fibromyalgies », explique le chercheur, ce qui complexifie d’autant plus le traitement..

 

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